Chronique : Universités françaises : Bloquer pour résister

Rien ne va plus dans le monde de l’enseignement supérieur français. La réforme de l’autonomie des universités, considérée par la ministre Valérie Pécresse comme accomplie cet été pendant que les étudiants étaient en vacances, est remise en cause par une bonne partie de ces derniers en ce mois de novembre, qui s’annonce rude pour le nouveau gouvernement et le président de la république, Nicolas Sarkozy, élu au suffrage universel direct en mai dernier. À ce jour et malgré parfois l’intervention de CRS, quatorze facs sont déjà bloquées : Aix-Marseille I, Caen, Clignancourt (Paris IV), Lille I, Lille III, Lyon, Nanterre (Paris X), Nantes, Pau, Perpignan, Rennes II, Rouen, Tolbiac (Paris I), Toulouse II le Mirail. Et une quarantaine d’autres universités devraient être perturbées dans les prochains jours selon les prévisions. Fini cette fois donc l’état de grâce pour le président et surtout pour ses ministres ! En particulier, ici, sa ministre de l’enseignement supérieur, qui a déjà lâché une rallonge budgétaire supplémentaire de 11 millions d’euros pour le logement étudiant et de 5 millions d’euros pour la revalorisation de la licence face à la grogne qui monte considérablement, mais qui n’en est qu’à son début. Face à cette grogne, qui passe donc désormais par le blocage et qui engendre parfois la fermeture administrative de l’établissement comme à Aix-Marseille I, les médias laissent entendre que certains étudiants se plaignent du blocage : ce qui n’est pas faux. Ceux-là réjouissent le gouvernement, qui comme au temps du CPE, s’appuie sur leur mécontentement pour défendre sa réforme considérée pourtant comme injuste par ces mêmes étudiants qui, comme les bloqueurs, demandent son abrogation pure et simple. L’attitude du gouvernement, qui consiste à prendre la défense de ceux qui demandent la fin du blocage pour permettre à ceux qui le souhaitent d’aller en cours, démontre très bien que s’opposer au blocage tout en étant opposé moralement à la loi ne peut que faire le jeu de cette réforme. Ne pas bloquer et combattre le blocage, c’est approuver directement ou indirectement la réforme Pécresse. Malgré cette évidence, certains continuent à se plaindre du blocage. Une plainte absurde et de mauvaise foi : en Assemblée générale, les trois points cruciaux proposés et votés sont les suivants : le principe de la grève, l’occupation et le blocage. Quasiment tous les présents votent la grève, mais parmi ceux-là une bonne partie s’oppose au blocage pour aller en cours. Or, être gréviste revient à ne pas aller en cours donc le blocage ne peut bloquer un gréviste. Donc un gréviste n’a pas à râler d’être empêché d’aller en cours. Et même s’ils sont une minorité à se plaindre, il faut bien comprendre que bloquer revient à résister et débloquer à capituler. Nous ne sommes qu’au début de l’histoire. Mais déjà, dans l’Histoire avec un grand « H », surtout en France, nous savons que la majorité du peuple attend toujours d’être devant le fait accompli pour agir ou mieux de connaître la fin de l’évènement pour se déterminer. Ainsi, si la réforme Pécresse est retirée, beaucoup croiront que leur conscience opposée à cette réforme y aura joué le rôle majeur alors que seuls les bloqueurs auront vraiment résisté. Les adversaires du blocage se réclameront sans gêne et comme d’habitude de cette résistance alors qu’ils auront tout fait pour l’empêcher et qu’ils n’auront donc aucun mérite. Aujourd’hui, le seul moyen pour l’étudiant d’être entendu est de bloquer sa faculté. Chacun doit en avoir conscience au plus tôt. Cette situation a déjà trois mois de retard.

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