Prélèvement à la source ?

De nombreux États occidentaux, comme la France et le Royaume-Uni, taxent l’eau. Il en va de même pour certaines provinces canadiennes : la Saskatchewan, le Manitoba et l’Ontario. Et les résultats sont là : la consommation d’eau résidentielle y a baissé de 70 %, rapporte environnement Canada. Au Québec, difficile pour l’instant d’atteindre ces résultats car seulement 20 % des habitations sont équipées de compteurs d’eau. La méthode de tarification diffère d’une municipalité à l’autre. La ville de Brossard, en banlieue de Montréal, est un exemple d’application du principe de l’utilisateur-payeur. Par le biais de la « taxe d’égoût et d’aqueduc », les citoyens paient l’eau par litre consommé. Cette approche fonctionne très bien selon M. Gallant, directeur général adjoint de la Ville : « Notre pourcentage de perte et de consommation d’eau par habitant est beaucoup plus faible que la moyenne de la province. Les citoyens comprennent que plus la consommation augmente, plus les factures grimpent. De notre côté, nous nous engageons à fournir un service impeccable pour garder nos réseaux en excellente condition. » Louise Cournoyer, résidante de Brossard, est plus mitigée : « Ce n’est pas une question de compteurs, c’est une question de conscience. Les compteurs ne font pas en sorte que je sois plus vigilante, puisque de toute façon, le prix est trop faible pour faire une différence. » Une illusion ? Pour d’autres municipalités, comme Laval, la tarification au litre ne fait pas partie des projets. « Peut-être que les compteurs changeraient les mauvaises habitudes, affirme le porteparole de la ville, Michel Laforge, mais ce n’est pas le meilleur moyen pour sensibiliser les résidents. On n’a qu’à regarder le prix de l’essence : ce n’est pas parce qu’il monte que les citoyens en consomment moins. Changer les habitudes de vie, c’est un travail de longue haleine. » Cette idée est appuyée par Stéphane Venne, directeur associé des communications à la Direction de l’eau de Montréal. Pour lui, dans les villes munies de compteurs, le budget global de l’eau n’est pas toujours connu avec précision et le tarif au mètre cube ne reflète pas nécessairement les coûts
réels des infrastructures, « mais il en crée l’illusion ». L’efficacité des compteurs d’eau est même contestée chez les militants écologistes. Pour plusieurs d’entre eux, le système de tarification forfaitaire – facturer un montant fixe chaque année au citoyen par le compte de taxes foncières – est plus efficace que les compteurs pour sensibiliser le citoyen au gaspillage. Martine Ouellet, viceprésidente de la coalition Eau Secours, fait partie de ceux-là. « Tout le monde doit avoir accès à l’eau, c’est une question d’équité sociale. La taxe municipale actuelle tient compte de la consommation des entreprises et de la capacité de payer du citoyen. C’est la façon la moins coûteuse d’aller chercher les revenus nécessaires aux services de l’eau », explique-t-elle. Plutôt que d’opter pour les compteurs à domicile, il faudrait que le gouvernement et les municipalités misent sur la réglementation. « Les amendes aux citoyens contrevenants sont plus dissuasives et moins coûteuses », poursuit-elle. Serge Roy, président de l’Association québécoise pour le contrat mondial de l’eau (AQCME), se méfie également du principe de l’utilisateur-payeur. « C’est un moyen d’aller chercher du financement à un moment où les infrastructures ont besoin d’être rénovées. Or, ce financement peut se faire par la taxe foncière générale. Quant au gaspillage, le gouvernement devrait miser sur des campagnes de sensibilisation et d’éducation populaire, comme ça s’est fait dans de grandes villes telles que New York. » Free-for-all au Québec Ceux qui considèrent les compteurs comme un outil efficace pour inciter les résidants à moins gaspiller l’eau croient au contraire que la tarification à forfait désavantage les moins nantis. « En ce moment, au Québec, c’est le free-for-all. Le système de taxes actuel fait en sorte que les plus riches en profitent pendant que les plus pauvres paient. Il y a du gaspillage et on ne frappe pas sur les bonnes personnes », affirme Réjean Piché, vice-président de Tekno, une entreprise qui oeuvre dans le traitement de l’eau depuis 30 ans. Plusieurs militants de l’eau perçoivent l’installation de compteurs comme une porte ouverte pour les entreprises désireuses de mettre la main sur la gestion de l’eau au Québec. M. Piché n’est pas de cet avis. « Si les villes restent toujours propriétaires de leur système, il n’y a aucun danger. Les arrondissements de Saint-Laurent et Mercier ont installé des compteurs dans les résidences, et pourtant la gestion n’est pas privatisée. Par ailleurs, il y a toujours moyen de confier la gestion de l’eau à une société d’État comme Hydro-Québec ou Gaz Métro », conclut-il. Illustration : Clément de Gaulejac Le journal indépendant de l’Université de Montréal Quartier Libre est le principal journal des étudiants de l’Université de Montréal (UdeM). Organe de diffusion indépendant de la direction de l’UdeM, Quartier Libre est un bimensuel distribué à plus de 7000 exemplaires sur et autour du campus. Quartier Libre compte sur la collaboration de plusieurs étudiants (dans différents domaines d’étude) de l’UdeM et de quelques journalistes extérieurs. Il se veut un journal école, un tremplin pour les étudiants qui souhaitent faire carrière en journalisme et se donne comme mandat de traiter de tous les sujets chauds du campus de l’UdeM et d’ailleurs, de faire des analyses sur des thèmes de société et internationaux et de promouvoir la culture émergeante qui n’est pas ou peu couverte par les autres journaux québécois. Innovateur et dynamique, il a été nommé « meilleur journal étudiant du Canada » par Paul Wells, chroniqueur au magazine canadien Macleans. L’ensemble de la rédaction est rémunéré pour son travail. L’équipe rédactionnelle 2007-2008 est composée de Rachelle Mc Duff (directrice et rédactrice en chef), Clément Sabourin (chef de pupitre campus), Julie Delporte (chef de pupitre culture), Thomas Gerbet (chef de pupitre société-monde) et Clément de Gaulejac (directeur artistique).

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